Une femme souffre au plus profond de son être
Osho,
Dans Le Prophète de Khalil Gibran, une femme demande à Almustapha de parler de la douleur. Veux-tu commenter cet extrait ?
'Et une femme demanda : 'Parle-nous de la douleur.'
'Et Almustapha dit : 'Par la douleur se brise la coquille qui enveloppe ton entendement. De même que le noyau du fruit doit se rompre pour que son cœur puisse s'offrir au soleil, ainsi dois-tu connaître la douleur.
'Et pourrais-tu garder ton cœur dans l'émerveillement du miracle quotidien de la vie,
'Ta douleur n'apparaîtrait pas moins merveilleuse que ta joie.. .
'Et tu accepterais les saisons de ton cœur, de même que tu as toujours accepté les saisons qui passent sur tes champs.
'Et tu veillerais avec sérénité, à travers les hivers de ta tristesse.
'Pour beaucoup, c'est toi-même qui choisis ta douleur.
'C'est la potion amère par laquelle le médecin en toi guérit ton 'moi' malade.
'Fais donc confiance au médecin et bois sa potion en silence et dans la tranquillité :
'Car sa main, quoique .lourde et dure, est guidée par la main bienveillante de l'Invisible.
'Et la coupe qu'il offre, bien qu'elle brûle tes lèvres, a été façonnée de l'argile que le Potier a mouillée de Ses propres larmes sacrées.'
Il semble qu'il soit très difficile, même pour un homme de l'envergure de Khalil Gibran, d'oublier une attitude profondément enracinée de phallocrate. Je dis cela parce que, d'une certaine façon, les déclarations que va faire Almustapha sont justes… et pourtant il leur manque quelque chose de fondamental.
Almustapha oublie que la question est soulevée par une femme; sa réponse est très générale, applicable à la fois à l'homme et à la femme. Mais la vérité est que les femmes ont enduré sur terre mille fois plus de douleurs et de souffrances que les hommes n'en ont jamais connues.
C'est pourquoi je dis qu'Almustapha répond à la question, mais pas à la personne qui la pose. Et si elle ne s'adresse pas à la personne qui questionne, la réponse restera superficielle - aussi profonde qu'elle puisse paraître.
La réponse donne l'impression d'être académique, philosophique. Elle ne tient pas compte de ce que l'homme a fait à la femme - et il n'est pas seulement question d'un jour... mais de milliers d'années. Almustapha ne le mentionne même pas. Au contraire, il continue à faire ce que les prêtres et les politiciens ont toujours fait : donner des consolations. Derrière toutes ces belles paroles, il n'y a rien d'autre qu'une consolation - et la consolation ne peut pas remplacer la vérité.