Nil.jpg

Est-ce qu'il est bon de commencer par une méditation assise ou par une méditation active ?

<< Back

Vous pouvez entrer en méditation en étant juste assis mais alors soyez juste assis, ne faites pas autre chose. Si vous pouvez seulement être assis, cela devient méditation. Soyez complètement dans le fait d’être assis ; le 'non-mouvement' devrait être votre seul mouvement. En fait, le mot ZEN vient du mot za zen qui veut dire : juste assis sans rien faire. Si vous pouvez être juste assis, sans rien faire, ni avec votre corps ni avec votre mental, cela devient la méditation, mais c’est difficile.

C’est très facile d’être assis lorsque vous faites quelque chose mais lorsque vous êtes juste assis sans rien faire, cela devient un problème. Chaque fibre du corps commence à bouger à l’intérieur, chaque muscle commence à bouger. Vous commencerez à ressentir un tremblement subtil, vous prendrez conscience de nombreux points du corps dont vous n’avez jamais pris conscience auparavant. Plus vous essayez d’être seulement assis plus vous ressentez de mouvements à l’intérieur de vous. On ne peut donc utiliser la position assise que si l’on a d’abord fait quelque chose.

Vous pouvez juste marcher, c’est le plus facile. Vous pouvez juste danser, ce qui est encore plus facile, et lorsque vous avez fait d’autres choses faciles, alors vous pouvez vous asseoir. S’asseoir dans la posture du Bouddha est réellement la dernière chose à faire : on ne devrait jamais le faire au début. Ce n’est seulement qu’après vous être sentis totalement identifié avec le mouvement que vous pouvez commencer à vous sentir totalement identifié avec le 'non mouvement'.

C’est pourquoi je ne dis jamais aux gens de commencer par la position assise. Commencez par un début facile sinon vous allez bientôt ressentir des choses inutiles, des choses qui n’existent pas.
Si vous commencez par la position assise vous ressentirez beaucoup de perturbations à l’intérieur de vous. Plus vous essayerez d’être seulement assis, plus vous ressentirez de perturbations, vous prendrez juste conscience de la folie de votre mental et rien d’autre, cela vous déprimera et vous vous sentirez frustré. Vous ne vous sentirez pas heureux et au contraire vous allez même ressentir que vous êtes fou et parfois même vous pouvez réellement perdre la raison.

Si vous faites un effort sincère pour être 'juste assis', vous pouvez vraiment perdre la raison. C’est seulement parce que les gens n’essaient pas vraiment réellement que la folie ne survient pas plus souvent. Avec la position assise vous commencez à percevoir tant de folie à l’intérieur de vous que si vous êtes sincère et si vous continuez vous pouvez réellement devenir fou. C’est arrivé si souvent autrefois que je ne suggère jamais rien qui puisse créer de la frustration, de la dépression ou de la tristesse, quoi que ce soit qui vous permette d’être trop conscient de votre folie. Il se peut que vous ne soyez pas prêt à prendre conscience de toute la démence qui est en vous et on doit vous permettre d’apprendre certaines choses graduellement. La connaissance n’est pas toujours bonne, elle doit se révéler lentement à mesure que grandit votre capacité à l’intégrer.

Je commence par votre folie, pas avec la position assise; j’autorise votre folie. Si vous dansez follement il se passe le contraire en vous. En dansant follement, vous prenez conscience d’un point silencieux à l’intérieur de vous, en vous asseyant en silence vous commencez à être conscient de la folie.

L’opposé est toujours le point de conscience. En dansant follement, de manière chaotique, avec des pleurs, une respiration chaotique, je permets votre folie. Alors vous commencez à prendre conscience d’un point subtil, un point profond en vous qui est silencieux et immobile et qui contraste avec la folie qui est autour. Vous vous sentirez très heureux car dans votre centre il y a un silence intérieur. Mais si vous êtes juste assis alors c’est l’intérieur qui est fou ; vous êtes silencieux à l’extérieur, mais à l’intérieur vous êtes fou.

Si vous commencez par quelque chose d’actif, quelque chose de positif, de vivant, en mouvement, ce sera mieux et vous commencerez à sentir grandir le calme intérieur. Plus il grandit, plus il vous sera possible d’utiliser une position assise ou couchée, plus la méditation silencieuse sera possible.

Une technique de méditation qui débute par le mouvement et l’action vous aide aussi d’une autre façon : cela devient une catharsis. Quand vous êtes juste assis vous êtes frustré, votre mental veut bouger et vous êtes juste assis. Chaque muscle se contracte, chaque nerf se contracte. Vous essayez de forcer quelque chose en vous qui ne vous est pas naturel et vous êtes partagé entre celui qui force l’autre et celui qui est forcé. En vérité la partie qui est forcée et réprimée est la partie la plus authentique. C’est la partie la plus importante de votre mental que celle qui est réprimée et la partie principale doit nécessairement gagner.

Ce que vous réprimiez doit réellement être jeté mais pas réprimé. Tout cela s’est accumulé en vous car vous avez continuellement refoulé. Toute l’éducation, la civilisation, la formation sont répressives. Vous avez réprimé beaucoup de choses qui auraient pu être nettoyées très facilement avec une éducation différente, plus consciente, avec des parents plus conscients. Avec une meilleure connaissance du mécanisme interne du mental, la culture aurait pu vous permettre de vous débarrasser de beaucoup de choses. Par exemple lorsqu’un enfant est en colère nous lui disons : 'ne sois pas en colère.' Il commence à réprimer la colère et bientôt ce qui était un événement passager devient permanent. Maintenant il n’agira plus dans la colère, mais il y restera en permanence. Nous avons accumulé tant de colère pour des évènements qui étaient momentanés ! On ne peut pas être continuellement en colère à moins que la colère ait été étouffée. La colère est une chose momentanée qui va et qui vient, si elle est réprimée vous n’êtes plus fâché. En ce qui me concerne, je permettrais à l’enfant d’être plus authentiquement en colère. Soyez en colère, mais allez-y profondément, ne la réprimez pas.

Bien sur il y aura des problèmes : si nous disons 'sois en colère' alors vous allez être en colère contre quelqu’un. Mais un enfant peut être modelé, on peut lui donner un oreiller et lui dire : 'sois en colère contre l’oreiller, sois violent avec lui'. On peut dès le début orienter un enfant dans une voie où la colère est juste déviée. On peut lui donner un objet pour qu’il le jette jusqu’à ce que sa colère s’en aille. En quelques minutes, quelques secondes, il aura dissipé sa colère mais il ne l’aura pas accumulée.

Vous avez accumulé la colère, le sexe, la violence, l’avidité, tout ! Maintenant cette accumulation s’est transformée en folie en vous, c’est là, à l’intérieur de vous. Si vous commencez par une méditation répressive, par exemple juste assis, vous allez réprimer tout ça sans lui permettre de sortir. C’est pourquoi je commence par une catharsis. D’abord débarrassez-vous de tout ce qui était réprimé et lorsque vous pourrez jeter votre colère vous serez devenu mature.

Si je ne peux pas être seul en amour, si je ne peux être dans l’amour qu’avec une personne dont je suis amoureux alors c’est que je ne suis pas encore réellement mur. J’ai besoin de quelqu’un pour aimer, il me faut quelqu’un, alors seulement je peux aimer. Mais de ce fait cet amour ne peut être qu’une chose très superficielle : ce n’est pas ma nature. Si je suis seul dans ma chambre je ne suis pas du tout dans l’amour et donc la qualité de cet amour n’est pas très profonde, ce n’est pas devenu une partie de mon être.

Vous devenez de plus en plus mur lorsque vous êtes de moins en moins dépendant. Si vous pouvez être seul dans la colère alors vous êtes plus mur. Vous n’avez pas besoin d’objet pour être en colère, c’est pourquoi, au début, je fais toujours une catharsis. Vous devez tout jeter sans avoir besoin d’un objet.

Soyez en colère sans la personne contre laquelle vous voudriez être en colère. Pleurez sans aucune raison, riez, juste riez sans aucun motif, alors vous pouvez jeter toutes ces choses accumulées, vous pouvez juste les balancer. Une fois que vous connaissez le moyen vous pouvez être soulagé de tout le passé.

A certains moments vous pouvez vous soulager de toute une vie, de plusieurs vies même. Si vous êtes prêt à tout jeter, si vous permettez à votre folie de s’exprimer, à ce moment là s’opère un profond nettoyage. Maintenant vous êtes nettoyé, frais, innocent, vous êtes à nouveau un enfant. Alors maintenant, dans cet état d’innocence, vous pouvez faire une méditation assise, assis ou bien couché ou autrement, parce que maintenant il n’y a plus le fou à l’intérieur pour perturber la méditation assise. Le nettoyage, la catharsis doit être la première des choses sinon avec des exercices de respiration, avec la méditation assise, en pratiquant les asanas, les postures de yogas, vous ne faite que réprimer quelque chose. Il se passe une chose très étrange : lorsque vous avez accepté de tout jeter, la méditation assise se réalise, les asanas se réalisent… car c’est devenu spontané.

Vous ne savez peut-être rien des asanas yogiques mais vous commencez à les faire, ces postures sont devenues authentiques, réelles. Elles amènent beaucoup de transformations dans votre corps, car maintenant c’est le corps lui-même qui les pratique, vous ne le forcez pas. Par exemple lorsque quelqu’un s’est débarrassé de beaucoup de choses, il peut essayer de tenir debout sur la tête. Il peut ne jamais avoir appris à faire 'shirshasan', le poirier, mais maintenant tout son corps cherche à le faire. C’est maintenant quelque chose de très intérieur, cela vient de la sagesse intérieure du corps, pas d’une information intellectuelle ou cérébrale du mental. Si le corps insiste : 'allez fait le poirier !' et qu’il se le permette, il va se sentir très régénéré, très transformé. Vous pouvez faire n’importe quelle posture mais je n’autorise ces postures que lorsqu’elles se réalisent d’elles-mêmes. Quelqu’un peut s’asseoir en silence en 'siddhasan' ou dans n’importe quelle posture mais ce 'siddhasan' est quelque chose de tout à fait différent, sa qualité est différente. Il essaie de rester en silence dans la position assise et c’est une réussite car il n’y a pas de répression, il n’y a pas d’effort, c’est juste comme votre corps le ressent. Tout votre être ressent le fait d’être assis. Dans cette posture assise il n’y a pas de mental divisé ni de répression, cela devient un épanouissement.

Vous avez dû voir des statues de Bouddha assis sur une fleur, une fleur de lotus. Le lotus n’est qu’un symbole, il symbolise ce qui se passe à l’intérieur de Bouddha. Quand 'être simplement assis' émerge de l’intérieur, vous ressentez exactement comme l’épanouissement d’une fleur, c’est plutôt une croissance, une ouverture de l’intérieur, quelque chose de l’intérieur s’ouvre et fleurit. Vous pouvez imiter la posture du Bouddha mais vous ne pouvez pas imiter la fleur. Vous pouvez être assis exactement comme le Bouddha, peut-être même plus, mais il n’y aura pas floraison à l’intérieur. On ne peut pas l’imiter.

Vous pouvez utiliser des astuces, vous pouvez utiliser des rythmes respiratoires qui vous forcent à rester immobile, à réprimer votre mental. Le souffle peut être très répressif parce que chaque rythme respiratoire détermine une humeur de votre mental. Non pas que les autres humeurs disparaissent, elles sont juste dissimulées.

Vous pouvez tout vous imposer. Si vous voulez être en colère, respirez selon le rythme de la respiration colérique. Les acteurs le font, lorsqu’ils veulent exprimer la colère ils changent leur rythme respiratoire, le rythme doit devenir le même que lorsqu’on est en colère. En pratiquant rapidement ce rythme ils commencent à ressentir de la colère et la partie en colère du mental émerge.

On peut donc utiliser le rythme respiratoire pour réprimer le mental, pour réprimer quoi que ce soit dans le mental, mais ce n’est pas bon, ce n’est pas épanouissant. L’autre moyen est meilleur : lorsque le mental se transforme et qu’en conséquence votre respiration change, le changement vient d’abord du mental.

J’utilise donc le rythme respiratoire comme un signe. Une personne à l’aise avec elle-même conserve constamment le même rythme respiratoire, il ne change jamais à cause du mental. Il peut changer à cause du corps, si vous courez il changera, mais il ne varie jamais à cause du mental.

Ainsi le tantra a utilisé beaucoup, beaucoup les rythmes respiratoires comme des clés secrètes. Ils permettent même de faire de la relation sexuelle une méditation mais ils ne le permettent que si votre rythme respiratoire reste régulier pendant la relation, autrement non. Si le mental est impliqué, le rythme respiratoire ne peut pas rester le même et si le rythme peut rester le même, alors le mental n’est pas du tout impliqué. Si le mental n’est pas impliqué, même dans un acte aussi profondément biologique qu’une relation sexuelle, alors il ne sera impliqué dans aucun autre.

Mais vous pouvez le forcer, vous pouvez vous asseoir et imposer à votre corps un rythme particulier, vous pouvez créer une fausse posture de Bouddha, mais vous serez seulement mort, vous deviendrez borné et stupide. C’est arrivé à tant de moines, à tant de sâdhus, qui sont juste devenus stupides. Leurs yeux n’ont aucune lueur d’intelligence, leurs visages sont idiots, sans lumière, sans flamme intérieure. Parce qu’ils ont tellement peur de tout mouvement intérieur, ils ont tout réprimé même l’intelligence. L’intelligence est un mouvement, un des mouvements les plus subtils et si tout mouvement intérieur est supprimé, l’intelligence est affectée.

La conscience n’est pas une chose statique, la conscience aussi est mouvement, un flot dynamique. Donc si vous partez de l’extérieur et si vous vous forcez à vous asseoir comme une statue, vous tuez beaucoup de choses. Intéressez-vous d’abord à la catharsis pour nettoyer votre mental, pour tout jeter afin que vous deveniez vide et disponible pour permettre à quelque chose de l’au-delà de rentrer en vous. Alors la méditation assise et le silence deviennent possible mais pas avant. Pour moi le silence en lui-même n’est pas intéressant : vous pouvez créer un silence qui soit un silence mort. Le silence doit être vivant, dynamique. Si vous 'créez' le silence, vous deviendrez plus stupide, plus morne, plus mort ; mais dans un sens c’est plus facile et tant de personnes le font ! Toute la culture est si répressive qu’il vous est plus facile de vous réprimer encore davantage. De cette manière vous ne prenez aucun risque, vous n’avez pas à plonger.

Les gens viennent vers moi et me disent : 'apprends-nous une technique de méditation que nous puissions pratiquer en silence'. Pourquoi cette peur ? Ils ont tous un asile de fous dans la tête et ils continuent à dire : 'Donne-nous une technique que nous puissions pratiquer silencieusement'. Avec une technique silencieuse vous allez seulement devenir de plus en plus fou, en silence mais rien de plus.

Il faut ouvrir les portes de votre asile d’aliénés, n’ayez pas peur de ce que les autres diront. Celui qui se préoccupe de ce que les autres pensent ne peut descendre à l’intérieur de lui-même ; il sera trop occupé à se demander ce que les autres disent ou pensent.

Si vous vous asseyez juste silencieusement, les yeux fermés, tout ira bien : votre femme ou votre mari dira que vous êtes devenu une très bonne personne. Tout le monde souhaite que vous soyez mort, même les mères souhaitent que leur enfant soit mort, obéissant, silencieux. Toute la société souhaite que vous soyez ort. Les soi-disant bonnes personnes sont en réalité des morts.

Par conséquent ne vous souciez pas de ce que les autres pensent, ne vous souciez pas de l’image que les autres peuvent avoir de vous. Commencez par la catharsis et quelque chose de bon pourra s’épanouir en vous. Cela aura une qualité différente, une beauté différente, complètement différente, cela sera authentique.

Lorsque le silence vient vers vous, descend sur vous, il n’est pas faux. Vous ne l’avez pas cultivé, il vient vers vous, il 'vous arrive.' Vous commencez à le sentir s’épanouir en vous comme une mère commence à sentir son enfant pousser. Un profond silence est en train de grandir en vous, vous devenez enceinte de lui. Alors seulement il y a transformation, sinon il n’y a que déception. On peut être déçu ainsi pendant des vies et des vies et cette capacité à le faire est infinie.
 

Osho, extrait de: Meditation: The Art of Ecstasy, #4

<< Back